CONTINENTAL DIVIDE

christian calon

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Essai sur la forme d'un continent d'après la transcription sonore de ses bassins versants

Ce projet tient de l'utopie et du documentaire ; très peu de la fiction. Il s'adresse à un observateur idéal dont le regard pourrait à la fois englober l'ensemble du continent et observer chacun de ses détails. Il utilise pour se réaliser les moyens de l'art : art sonore, art vidéo. Pourtant, son objectif étant de connaissance, il pourrait se réclamer d'une forme de science intuitive …

Continental Divide est aussi un roadmovie. Il présente le point de vue privilégié d'un observateur, non limité par des contraintes de fonctionalité (exploitation d'un territoire) ou scientifiques (sciences de la Terre), mais pouvant tirer profit de ces savoirs. Le projet possède cet avantage que lui donne le fait de reposer uniquement sur un pur désir de connaissance, relative à son point de vue et à son échelle; c'est-à-dire dans un rapport direct d'observateur inclus dans le paysage.

Cette différence, anodine, peut avoir des conséquences remarquables lorsqu'elle est traduite sous la forme d'interrogations : Quel est le temps d'un très grand espace? Et celui d'une image? Quel est le son d'un continent?

Un des objectifs de Continental Divide est de transmettre l'expérience concrète de la forme et de la nature de ce continent (de sa partie nord), qui ne peut être véhiculée par l'abstraction des représentations cartographiques. Si, au-delà de cette connaissance, il éveille le désir d'aller voir par soi-même, que le lecteur se rassure : il trouvera autre chose que ce que j'ai vu durant ce périple sonore et visuel de sept mois et de 41.000 km à travers les trois bassins versants majeurs du Canada.

Entre le très près et le très loin, les points de vue du regardeur

Considérer la surface visible du continent comme une matière organisée. Une étendue sur laquelle des signes écrits, tracés, griffonés et creusés par le temps, donne à lire une histoire de la matière et des êtres. Le paysage est cette histoire qui, si elle ne peut révéler directement sa forme (dissimulée derrière la prolifération des images), pourrait la manifester autrement.

Divisions naturelles

En géologie, la ligne de partage des eaux (continental divide) désigne cette démarcation selon laquelle les rivières et les fleuves s'écoulent dans des directions différentes vers les océans qui bordent un continent. La découverte, le développement et les divisions les plus anciennes de cet espace sont entièrement conditionnées par ces contraintes naturelles. Le territoire canadien est ainsi subdivisé en trois réseaux hydrographiques principaux : les bassins versants océaniques de l'Arctique, de l'Atlantique et du Pacifique.

Chaque bassin, présente des caractères et des paysages extrêmement contrastés. L’apport de nouvelles branches d’étude des sciences de la Terre, qui repensent en termes perceptifs l’analyse d’un territoire, m'a fourni les outils pour transposer les concepts et trouver des bases d’équivalence entre l’analyse d'un paysage et sa représentation possible par le sonore.

À partir d'une masse importante d'images filmées et photographiées le long des 41,000 km de mes parcours à travers le Canada, d’une quantité tout aussi imposante de documents produits par différents organismes gouvernementaux ou indépendants qui détaillent la topographie, les réseaux hydrographiques, la géographie physique et humaine, la géologie ainsi que l’histoire du continent, il m’a été possible de corroborer des valeurs chiffrées à des données visuelles et de tracer une partition qui reprend et décrit les grandes manifestations d’un territoire démesuré et fascinant.

Transcription sonore

Cette partition de Continental Divide reprend la structure en trois parties des bassins versants. À l’intérieur de chaque bassin, les divisions naturelles (les écozones) forment des tableaux de durée variable. Une écozone est définie par une combinaison de cinq catégories : le Relief, l’Eau, la Forêt, les Cultures, l’Urbanisation. Chaque catégorie est décrite par plusieurs paramètres dont la notation sert de cadre à la transcription vers les couches sonores individuelles.

C'est à dessein que les sons référentiels, provenant de la "nature", ont été largement évités. Ils sont en effet toujours la manifestation d'un lieu et d'un moment unique. Moins connotée, la matière électronique se prête mieux aux tracés des lignes et des formes, sans leur imposer d’image.

La nature particulière de Continental Divide tient aux fonctions que le son et l'image y occupent et au rapport qu'ils entretiennent. Ils sont organisés à la façon d'une polyphonie à six voix. La partie sonore, formée de cinq couches, est la transcription fidèle des tracés et profils dynamiques. Le son y révèle la forme du paysage. L'image, sixième voix de cette polyphonie, a pour fonction d'ancrer ces formes dans la matière du paysage.

Une mise en garde : ce n’est pas tant d’espace qu’il s’agit, mais de temps. Pas non plus du son ou de l'image, mais de l’écoute et du regard.

Et si, contre toute attente, de ces transcriptions géomorphologiques, quelque chose émerge qui ressemble à une musique, c'est qu'elle était déjà présente dans la matière, attendant d'être révélée.

Christian Calon

Essay on the shape of a continent from the sound transcription of its watersheds

This project holds from utopia and documentary; very little from fiction. It imagines an ideal observer whose gaze could both encompass the entire continent and observe it's every detail. To achieve this, it uses the means of art : video art and sound art. However, its aim being knowledge, it could take claim in a form of intuitive science ...

Continental Divide is also a roadmovie. It has the vantage point of an observer not limited by the constraints of functionality (land use) or scientific (Earth Sciences), but who can benefit from this knowledge. The project has an advantage that comes from the fact of relying solely on a pure desire for knowledge, relative to its point of view and its scale, that is to say in the direct relationship of an observer included in the landscape.

This difference, however trivial, may have remarkable consequences when translated in the form of questions : What is the time of a large space? And that of an image? What is the sound of a continent?

One of the objectives of Continental Divide is to convey the actual experience of the form and nature of the continent (its northern part), which can not be conveyed by the abstraction of cartographic representations.

If beyond this knowledge, it awakens the desire to go see for oneself, may the reader be reassured : he will find something other than what I saw during my acoustic and visual journey of seven months and 41,000 km across the three major watersheds in Canada.

Near and afar, the viewpoints of the onlooker

Let’s think of the visible surface of the continent as organized matter. An expanse on which time has sketched, scribbled, written, embedded and erased signs which tell a history of matter and beings. A landscape is a History which may not allow its form to be directly revealed (burried under the the proliferation of images), but which may manifest it differently.

Natural divides

In geology, a continental divide indicates the demarcation according to which rivers flow in different directions towards the oceans bordering a continent. The discovery, development and the oldest divisions of space are entirely conditioned by these natural constraints. The Canadian territory is thus divided into three major water systems : the Arctic, Atlantic and Pacific watersheds.

Each basin has highly contrasting characters and landscapes. New branches of study in Earth Sciences, which rethink in perceptive terms the analysis of a territory, gave me the tools to translate the concepts and find bases of equivalence between the analysis of a landscape and its possible representation in sound.

The huge amount of images (film and stills) captured along the 41,000 km journey through the landscape was added to equally impressive amounts of research material produced by various government offices or independent institutions. With these in hand, it became possible to corroborate numerical data to visual characteristics and undertake the sketching of the score that contains and describes the major events of a boundless and fascinating land.

Sound transcription

The score of Continental Divide follows the three-part structure of the watersheds. Within each basin, natural divisions (ecozones) constitute sequences of variable length. An ecozone is defined by a combination of five categories : Relief, Water, Forest, Cultures, Urbanisation. Each category is described by several parameters, the notation of which provides a framework for the transcription to the individual layers of sound.

It is on purpose that the referential sounds of "nature" were largely avoided. Indeed, they are always a manifestation of a unique place and time. Less referential, electronic material is better suited to the plotting of lines and shapes, without imposing an image.

The particular nature of Continental Divide holds to the functions which sound and image take and to the relationship they maintain. They are organized like a six-voice polyphony. The audio portion, consisting of five layers, is a faithful transcription of plots and dynamic profiles. The sound reveals the shape of the landscape. The image, the sixth voice of this polyphony, has for function the anchoring of these forms in the matter of the landscape.

A warning : it is not so much a question of space, but one of time. Nor is it about sound or image, but rather listening and seeing.

And if, against all expectations, of these geomorphological transcriptions, something emerges that resembles music, it is that it was already present in the matter, waiting to be revealed.

Christian Calon

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